lundi 26 novembre 2012

Heil to the King ! - Annexe [Nosfé]


Bon, ce n'est pas comme Pow-Wow, nul besoin d'un appendice explicatif, non?

Alors venons-en au point important : LE JEU !
Je m'explique.
Trouvant que mon texte manquait de « saucisses », j'ai cherché à pallier à cette carence par l'absurde, et j'en ai donc rajouté... au niveau « rock n'roll ».
Voilà donc un petit jeu qui fera appel à votre culture Rock et - un peu - à vos connaissances en anglais (pardon d'avance aux anglophobes).
Heil to The King est ponctué de références à des standards du rock. Des titres ou des paroles de chansons (ou les 2), traduits (ou non) et intégrés au texte. Plus parfois quelque menus indices (un mot ou deux...).

Il y en a 25 à trouver, sauf erreur ou référence inconsciente de ma part.
Couvrant à peu près toutes les époques et tous les styles (bon, j'me connais, c'est pas mal orienté 60-70's, mais j'y peux rien si c'était la meilleure période).
Et ces 25 titres sont, hors reprises postérieures, de 25 groupes/artistes différents.
A vous de les retrouver !
Bonne lecture et bonne chasse !


(les réponses au jeu, c'est par ici)

vendredi 23 novembre 2012

Heil to the King ! [Nosfé]


Billy Bob palpa une nouvelle fois la poche pectorale de son uniforme, mais le paquet de Lucky Strike qu'elle contenait était désespérément vide. Shit. Plus une sèche. Et vue l'heure, guère d'espoir de pouvoir en acheter un paquet neuf une fois arrivé à la caserne. Shit, et fuck même.
De dépit, il se mit à jongler avec son Zippo, le faisant passer entre ses doigts.
Un nid de poule sur la route fit tressauter le cametare, et tous les GIs assis en rang à l'intérieur, Billy Bob compris. Il en perdit son briquet qui glissa entre les Rangers de son voisin. Celui-ci, grand dégingandé édenté, lui lança un sourire mou et narquois.
Billy Bob pouvait faire un trait sur son feu.
Ça pissait dehors. Une sale pluie froide de fin d'hiver. La longue et sinueuse route se déroulait, au creux d'une vallée sombre, emplie de conifères. Billy Bob jeta un œil à l'extérieur, vers l'arrière, par dessous la bâche, et il se dit que ces cons d'Allemands avaient eu le nez creux d'appeler cette région «Forêt Noire». Que des bois et de l'obscurité. Au fond, loin dans la vallée, Billy Bob entraperçut la lumière du soleil, planqué derrière une couche de nuages.
Cinq minutes après, il faisait nuit.
Il y avait un drôle de bordel quand ils arrivèrent à la base. Au poste de garde, à l'entrée, sous une pluie qui me semblait guère décidée à se calmer, une nuée de mectons en imperméables, hurlant en anglais aussi bien qu'en allemand, calepins à la main. Et les flashs de quelques photographes. Des journalistes. Ils entouraient un jeune gars en uniforme, un troufion lui-même encadré par la plus belle brochette de gradés que Billy Bob ait vue depuis qu'il faisait son service. Billy Bob détailla la scène et reconnut le bleu.
Putain d'Elvis Presley. 

mercredi 7 novembre 2012

L'initiation de l'infirmier [Maniak]


      

       Assis sur la banquette arrière, Gavin regardait le paysage défiler tandis que la voiture s'enfonçait à toute vitesse dans la campagne anglaise. Il faisait froid, et les arbres nus tendaient leurs branches griffues haut dans le ciel comme pour tenter d'attraper les premiers rayons du soleil. La silhouette sombre et trapue de l’hôpital était déjà très loin derrière eux. Assis à l'avant, William se retourna et eut un large sourire à l'attention de Gavin. Puis il lui passa la cagoule de velours noir sur la tête.
         « Tu n'as pas encore le droit de voir où on va » dit-il.
         La respiration de Gavin se fit plus lourde sous l'épaisse étoffe. Il n'aimait pas trop ça. Tous ces rituels initiatiques et ces bizutages n'étaient pour lui que de nouvelles manières de l'humilier, et pour rien au monde il ne souhaitait subir ou infliger ces cérémonies vexantes. Mais voilà, il était bien obligé de s'y conformer. William, l'infirmier en chef de l'hôpital de Gatesborough le lui avait bien fait comprendre. S'il ne s'y pliait pas, il vivrait l'enfer. Et Gavin s'y était résigné. Malingre et roux, le regard fuyant comme pour afficher sa faiblesse, Gavin avait toujours attiré les brimades durant sa scolarité, et il ne s'étonnait pas que cela continue alors que sa vie professionnelle débutait à peine. Son caractère n'était pas assez solide pour se révolter et il s'était contenté d'endurer les vexations en attendant que ça passe.
         La voiture s'arrêta. Les deux infirmiers qui encadraient Gavin sur la banquette l'aidèrent à sortir. La cagoule glissa et Gavin put apercevoir un paysage de forêt avant que sa vision ne soit à nouveau occultée. L'air froid du matin traversait le velours et vint picoter sa peau. Au loin, les bruits de la ville qui commençait à s'animer perçaient le silence ouaté qui régnait sur la forêt. De temps à autre, un oiseau timide lançait sa plainte stridente, faisant sursauter Gavin à chaque fois. Il avait les nerfs à fleur de peau. Les autres le guidaient sur un chemin en terre qui courait entre les arbres. Gavin pouvait les entendre ricaner et glousser à chaque fois qu'il manquait de trébucher sur une racine. Au creux de son ventre, il sentait une inquiétude encore vague qui enflait. 

samedi 3 novembre 2012

L'insomnie des éléphants [Diane]


L’insomnie des éléphants

« Me souvenir des morts, collecter l’ivoire, ça me tue. »
        
J’associe, à tort ou à raison, mon viol avec la mort de ma mère, dans le temps. Qu’il existe d’autres liens, sur d’autres plans, dans d’autres dimensions, entre ces deux affaires, c’est fort possible. Il m’est déjà difficile de dire ce que je crois savoir.  
         Je suis allée, il n’y a pas très longtemps, sur la tombe de ma mère. J’ai enlevé les vieilles fleurs, certainement posées par mon frère aîné ou par mon père, lors d’une précédente visite familiale à laquelle je n’ai pas été conviée. Mon père, bien que remarié, n’a pas oublié sa première femme. Où se trouvait à présent le corps de sa première femme. Il se trouvait là. Pourri sous terre, les os à vif aussi bien en été qu’en hiver, c’est bien qu’il n’oublie pas. Il ne peut pas, les enfants lui rappellent à son devoir. Les pères oublieraient sinon, même si c’est vrai que certains font des efforts. Mais j’ai nettoyé la tombe, et pour une raison que j’ignore, mon père n’a pas mis sur ce marbre sinistre les dates de naissance et de mort de ma mère, juste son prénom et son nom. Comme j’avais faim, je me suis assise sur la tombe, et j’ai croqué dans le panini que je venais d’acheter juste avant de pousser les grilles du cimetière. Le ciel était bleu avec quelques nuages. Il ne se passait rien de particulier ce jour-là, à part que je me suis rappelée, comment elle était morte. Elle était morte en un éclair. Un claquement de doigts. On avait diagnostiqué chez elle un mal, et ce mal en trois mois à peine l’a emportée, et je n’ai pas eu le temps de la voir partir ou de lui dire au revoir. Quand je dis « on » je parle bien entendu des médecins et des docteurs. Mon panini était bon, même si mon cul avait froid sur la pierre tombale de ma mère. Les fleurs fraîches avaient de l’allure, elles mettaient en valeur son nom, qui en lui portait l’histoire de sa naissance jusqu’à sa mort, histoire dont j’étais moi-même un chapitre vivant. C’est là que deux vieilles femmes qui passaient m’ont interpellée :
         - C’est une honte de voir ça, qu’est-ce que c’est que ça ? Vous n’avez aucun respect !
         Ce à quoi j’ai répondu, la bouche à moitié remplie de panini :
         - C’est ma mère, j’ai autant le droit de m’asseoir dessus que vous d’ignorer sa tombe en passant à côté. Vous devriez avoir honte d’ailleurs, c’était une femme remarquable.
         Les deux vieilles femmes, interloquées, ont poursuivi sans mot dire leur chemin, le long de la rangée F, pour atteindre la G, et d’autres personnes, voire des familles entières, m’ont regardée en train de mâchouiller mon sandwich sur la tombe de ma mère, mais pas une seule de ces personnes n’a osé m’interpeller comme les deux vieilles plus tôt. Plutôt, chez ces gens, c’était un questionnement qui se trouvait dans leurs yeux. Un écureuil est passé le long de la rangée, il fouillait dans les feuilles, et il a pris le reste de panini que je lui ai lancé pour le dévorer immédiatement.